Je n'arrive pas à me souvenir de
ma première découverte du thé. Dans ma famille, les enfants
buvaient du chocolat, les adultes du café ou de la chicorée. Le thé
n'existait pas, ou très peu, et de toute façon, il se confondait
avec n'importe quelle infusion. Le thé est alors une boisson chaude
pour adulte qui s'infuse. Ou plus précisément et plus
spécifiquement : le thé est une infusion qui ne se boit pas.
En revanche, il y a bel et bien
des infusions qui se boivent. Elles se boivent à des moments
particuliers et dans un endroit singulier : à la ferme des
grands-parents, dans un moment apaisé après le chahut enfantin. Les
parents sont absents, la grand-mère couve ses sept petits loups du
regard. Le grand-père, présence tranquille et rassurante, est
encore dans son fauteuil à lire le journal... Ou alors, il est
affairé, quelque part, à l'établi, au potager, au verger, qui
sait. Mais il viendra. Lui aussi aura sa tasse, ce temps d'union
calme et joyeuse. Ce peut être dans la cuisine, alors que l'automne
ou pire, l'hiver, tombe en pluie froide sur la campagne. La tisane
précédera alors le coucher, l'endormissement léger et le sommeil
confiant. Mais la scène peut être aussi à l'été, dans le jardin,
au pied de l'immense tilleul. Il y alors plus de monde. Des rires. Le
Soleil se couche, mais la nuit tardera à venir. Nous, les loupiots,
résisterons. Et toi, tilleul, grand et fort comme tu es, c'est nous
qui te buvons, en souriant de bonheur.
Patrick
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