Description de l'éditeur :
Le Pousse-pousse, le plus célèbre roman de Lao She, ce sont les
aventures de Siang-tse le Chameau dans le Pékin des années vingt et
trente. Sa grande ambition est de posséder son propre pousse-pousse.
Dans cette ville où tout est régi par la guerre, l’argent, le danger, il
ira de désillusion en désillusion et ne connaîtra que la déchéance et
le désenchantement. Mais c’est aussi le roman du petit peuple de Pékin,
un Pékin aujourd’hui disparu, que Lao She fait vivre, avec humour, sous
nos yeux : celui de Siang-tse, celui des petits métiers, celui des
colporteurs, avec leur langue savoureuse, leurs misères et leurs fêtes.
J'ai lu ce roman il y a quelques années déjà. Il m'a particulièrement touchée... bouleversée. C'est une histoire profondément humaine, la vie d'un honnête homme accablé de malheurs. Siang-tse tente de vivre tout simplement, malgré tout. A bord de son pousse-pousse, il m'a conduite dans les rues du Pékin du début du 20e siècle. Au travers de cette histoire si bien racontée, j'ai découvert une culture, une époque, un peuple, des coutumes, un mode de pensée....
Les femmes avaient un sort moins enviable encore. Elles devaient faire
face à tout : aux plaintes des vieillards, aux maladies des enfants, à
la violence de leur mari. Quand elles étaient enceintes, elles ne
cessaient pas de travailler et ne se nourrissaient que de bouillons de
riz avec des patates. Elles mendiaient aussi. Parfois, elles
rapportaient du linge à laver ou à rapiécer la nuit, sous une lampe à
pétrole, lorsque tout le monde était enfin endormi. Le vent qui entrait
par les fentes des murs de ces pièces exiguës enlevait toute chaleur.
Fatiguées, mal nourries - elles donnaient à manger aux vieux et aux
petits - elles étaient la plupart du temps malades. A trente ans, elles
perdaient leurs cheveux. Elles ne tardaient pas à mourir.
L'air de rien, de phrase en phrase, j'ai totalement accroché à cette histoire terriblement dure mais qui se lit pourtant très facilement. L'écriture légère et simple en fait une lecture fort agréable bien que le sujet en soit dramatique.
Oui, je vends ma force, mais je ne suis pas une esclave. Les riches ont
leur argent ; nous, les pauvres, on a notre dignité, pas vrai ?
Son coeur s'était endurci. Dans ce monde injuste, un pauvre ne pouvait
se défendre qu'avec un coeur dur pour préserver sa liberté, une liberté
dérisoire !
Ce "héros" m'a inspiré de la tendresse, de la compassion. J'ai souri à ses maladresses, à sa grande naïveté et même à sa bêtise. J'ai aussi eu la larme à l’œil. Les mésaventures de Siang-tse sont émouvantes et présentée avec un humour fin qui m'a tenue jusqu'à la fin.
Une chose lui sautait aux yeux : la vie du pauvre ressemblait fort à un
noyau de jujube, avec ses deux bouts pointus et son milieu bombé. Les
deux bouts pointus, c'est son enfance et sa vieillesse, démunies de
tout, risquant à tout instant d'être écrasées, mises en miettes, tandis
que le milieu bombé évoque sa jeunesse où la force physique lui permet
de profiter quelque peu de la vie.
Un gros coup de cœur pour ce roman !
A l’horizon grisâtre, perçait une lueur rouge. Les arbres, au loin,
paraissaient plus noirs. Peu après, le rouge et le gris se mêlèrent ; le
ciel devint couleur de raisins mûrs, avec par-ci par-là, des taches
gris-violet et d’autres franchement rouge. Un point d’un jaune brillant
se forma bientôt à l’horizon, donnant naissance à toute une gamme de
couleurs chatoyantes. L’orient tourna au carmin, tandis que le reste du
ciel virait au bleu. Soudain, les nuages s’ouvrirent, laissant le soleil
darder mille rayons d’or. Une vraie toile d’araignée, tissée de
lumière. Les champs, les arbres, les herbes passèrent du vert sombre à
l’émeraude scintillant. Les branches de sapin se teintèrent de rouge et
les ailes des oiseaux étincelèrent. Tout souriait. Devant le spectacle
de cette aurore grandiose, Siang-tse eut envie de pousser des cris.